Mariage malagasy : trois oui pour un nom?

14 avril 2015

Mariage malagasy : trois oui pour un nom?

Un mariage est au programme. Mon frère convole en justes noces. Et il est Malagasy. Je dois faire une emphase sur cette phrase parce que cela constituera le fondement de toute cette réflexion autour du mariage tel qu’il est conçu (ou imposé) à mon époque et dans ma culture.

 

Première marche

Dans les temps ancestraux, pour le Malagasy soit bien dit, l’union d’une femme et d’un homme était formalisée par une cérémonie appelée « fanateram-bodiondry ». Les parents du jeune homme offraient un cadeau à la famille de la jeune femme devant plusieurs témoins à la suite d’une bataille oratoire sans pitié. Je vous épargne le nombre de « transactions » non conclues juste parce que l’orateur d’un ou des deux côtés n’était pas à la hauteur ou que la somme donnée était estimée comme insuffisante. Cette cérémonie coutumière était suffisante pour dire d’une couple qu’ils étaient « mari et femme ». De là, ils pouvaient avoir leur foyer, leur indépendance, des enfants, des rêves, des scènes de ménage… bref, tout ce qui caractérise la vie maritale à proprement parler.

Deuxième marche

Aujourd’hui, bien malheureusement, cette pratique semble avoir été reléguée au rang de simples fiançailles. N’êtes vous passés que par cette étape ? On vous colle volontiers un regard limite hautain et on ne manque pas de vous citer que votre union n’est pas assez sacrée, un peu comme si vous n’êtes mariés qu’à 33,33%. Comme si l’union devait se mesurer comme un verre à moitié vide ou à moitié plein. Le besoin de recensement et les exigences du code civil aidant, le « fanateram-bodiondry » perd sa place en tant que cérémonie de mariage. Il faut dire une deuxième fois « oui » devant Monsieur le Maire pour que le verre commence à se remplir.

Troisième marche

Et après cette étape qui ne semble pas toujours être suffisante, j’en ai vu un bon nombre de couples qui se demandaient s’ils devraient se considérer comme mariés ou non. A ce stade, une bonne partie des concernés rentre encore chez leurs parents respectifs parce que cette cérémonie n’équivalait pas encore tout à celle de la célébration du mariage…selon les dires. Ceux qui se hasardent à vivre ensemble verront encore une avalanche de commentaires venus des bien-pensants sur le caractère non sacré de leur union, simplement parce qu’il faut passer par l’église pour que tout le truc soit validé. Validé par qui ?

Mariage_Gasy

Le sommet

Ah, j’ai oublié… « Par les pouvoirs qui me sont conférés par Dieu… » est une expression qu’il faille absolument entendre à plusieurs pour être sûr que la boucle soit bien bouclée. « Des pouvoirs… », c’est un mot fort, limite magique. Et quand des couples se déchirent quelques années plus tard, le « pouvoir » a-t-il déjà miraculeusement disparu ? Quand on fait 3 nœuds, on s’attend bien à ce que la corde soit bien nouée, non ? Avec trois vœux successifs, la corde au cou du couple malagasy devrait être solidement nouée… et les spectateurs sans voix. L’idée me fait bizarrement penser aux préliminaires d’une pendaison moyenâgeuse (et dire qu’ailleurs, on se préoccupe de la légitimité du mariage pour tous). Pourquoi compliquer les choses quand la vie peut être aussi simple qu’un « oui » ?

Trêve de réflexions macabres, je souhaite sincèrement du bonheur au foyer de mon frangin… Vous y êtes bientôt à 100% là.

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